Le
premier ministre s'est engagé mardi 14 octobre 2025 devant
l'Assemblé nationale (1) à « suspendre » la réforme
des retraites votée et mise en œuvre en 2023 en « gelant »
à 62 ans et 9 mois l'âge minimum de départ et à 170 le nombre de
trimestres de cotisation requis pour obtenir une pension sans décote.
Les personnes nées en 1963 ne voient donc pas leur situation changer
car si elles atteignent 62 ans au cours de cette année 2025, il leur
faut encore attendre 9 mois de plus pour faire valoir leur départ en
retraite, ce qui déborde largement sur l'année 2026. Pour celles et
ceux né(e)s en 1964, le droit à la retraite interviendra au mieux
fin 2026 et essentiellement début 2027. Mais qu'en sera-t-il après
l'élection présidentielle de mai 2027 pour les millésimes suivants
(1965 et au-delà) ? L'actuel premier ministre est bien
présomptueux de proclamer cette suspension de la réforme jusqu'en
janvier 2028, juste dans le but de répondre au compromis politique
du moment. Mais la prochaine majorité du prochain président de la
République pourrait très bien rétablir la réforme, voire
l'amplifier en portant l'âge de départ à 65 ans et en augmentant
la durée de cotisation comme ne s'en cachent pas certaines
personnalités politiques de premier plan prétendantes à la
fonction. Alors que cela avait été écarté par le gouvernement en
2023, l'alignement du calcul des pensions des fonctionnaires sur
celui des salariés du privé pourrait être mis en œuvre dès le
prochain mandat présidentiel. Cet alignement serait catastrophique
pour les professeurs, fonctionnaires d'Etat percevant les indemnités
les plus faibles de la catégorie A (2), et qui percevraient de ce
fait une pension décotée de 10 à 15% par rapport au calcul actuel.
Rappelons qu'en 2022, 32% des professeurs du second degré partent en
retraite avec une décote de leur pension (3). Ce taux ne peut
qu'augmenter ces prochaines années.
Ces
incertitudes et ces décisions couperets jettent les salariés du
privé et les fonctionnaires dans l'insécurité juridique la plus
totale et l'impossibilité de prendre des mesures pour prévoir un
tant soit peu à l'avance les conditions d'une fin de carrière
proche ou plus lointaine. La paupérisation rampante et assumée par
les gouvernements depuis 40 ans de la profession, conjuguée à de
futures conditions dégradées de retraite, ne peut que faire fuir ce
métier aux derniers volontaires. Le professorat, si ce mot peut
conserver son sens originel (4) deviendra une activité de transition
dans l'attente d'une situation mieux valorisée et rémunérée,
comme l'avait suggéré récemment un ancien et éphémère ministre
de l'éducation nationale, lui-même entre deux sinécures dorées de
la République pour bien montrer l'exemple (5).
(1)
A condition que l'Assemblée nationale vote cette suspension
https://www.franceinfo.fr/economie/retraite/reforme-des-retraites/age-de-depart-duree-de-cotisation-cout-que-changera-la-suspension-de-la-reforme-des-retraites-si-elle-est-votee_7552222.html?utm_source=firefox-newtab-fr-fr
(2)
Les indemnités et primes ne sont pas intégrées actuellement au
traitement pour le calcul de la pension de retraite dans la fonction
publique mais elles pourraient l'être dans le cadre de l'alignement
sur celui du privé pour compenser la diminution importante des
pensions qu'induit cet alignement.
(3)
https://www.education.gouv.fr/media/197556/download
(4)
https://le-sages.org/documents2/DGESCO_fin_liberte_pedagogique.pdf
(5)
Pap Ndiaye https://www.education.gouv.fr/media/197556/download