Réclamation du SAGES au CEDS concernant la liberté académique des PRAG et des PRCE (1er article sur le sujet)

Pour un syndicat, être l'avocat de la cause des PRAG et de PRCE, de leurs droits et intérêts, ce n'est pas seulement faire remonter leurs doléances et leurs revendications auprès des autorités ministérielles, des présidents d'université ou des parlementaires. Car le plus souvent, cette remontée ne suffit pas, pour diverses raisons :

- le gouvernement est déjà au courant du mécontentement et de ses raisons mais n'a aucune intention de changer quoi que ce soit dans le sens de ce qui lui est demandé par les personnels concernés, ayant en toute conscience décidé de faire peser sur ceux certains désavantages et inconvénients pour mieux préserver les avantages d'autres personnes

- le gouvernement, devant céder à ceux qui ont de l'influence auprès de lui, des intérêts communs, voire identiques, et  à ceux qui ont des moyens de blocage, voire de provoquer d'importants dégâts, ou d'influencer défavorablement l'opinion publique à son encontre, est d'autant moins enclin à concéder quoi que ce soit aux autres 

Les PRAG et les PRCE n'ont à l'évidence pas l'influence suffisante auprès du gouvernement (ce fut le cas pour les agrégés jusqu'au décès du Président Pompidou, lui-même normalien et agrégé, dans les années 70, mais c'est une époque révolue); ni les moyens collectifs de faire céder le gouvernement par des blocages, par une grève :  les retenues pour service non faits pour cause de grève et pour le retard dans la correction des copies ou la fourniture des notes à l'administration sont durement sanctionnées par l'administration, et la jurisprudence des juridictions administratives nous est très défavorable en la matière, sans aucun espoir d'évolution sauf dans le sens du pire.

Localement, le fait pour un PRAG ou un PRCE de refuser de faire des heures de cours ou de TD ou TP supplémentaires, ou de continuer à exercer telle ou telle activité administrative en plus de ses obligations statutaires, parce qu'elle est insuffisamment rémunérée ou exercée dans des conditions de travail inacceptables, peut conduire son université à mieux le rémunérer, à mieux le traiter. Ou au moins à diminuer le degré d'insatisfaction du PRAG ou du PRCE concerné. Mais l'université est contrainte par des normes nationales, et n'a pas forcément les moyens financiers pour apporter aux PRAG et PRCE des compléments de rémunération ou leur octroyer une décharge pour mener une activité administrative ou de recherche.  Et à moins de plusieurs milliers de telles actions locales de retrait  des activités supplémentaires (sans retenue sur le traitement principal dans ce cas), exercées simultanément et sur plusieurs mois, de telles actions ne sont pas susceptibles d'infléchir le gouvernement. D'autre part, ces compléments de revenus, même mal payés, sont souvent indispensables à nos collègues, surtout les plus jeunes. En outre, le cumul d'activités et de rémunérations, qui pourrait apporter des revenus de substitution, est moins favorable (plus restrictif) pour les PRAG et les PRCE que pour les maîtres de conférence, et est devenu beaucoup plus facilement détectable, donc plus aisé à sanctionner, par l'administration, avec les moyens offerts par le nuémérique.

Il est donc particulièrement important pour les PRAG et les PRCE de pouvoir optimiser leurs droits.

Ce qui suppose de bien les connaître :

- connaître les textes qui régissent directement les droits et intérêts des PRAG et des PRCE ; c'est le plus aisé à connaître et à faire connaître, même si les textes sont épars et parfois tellement mal rédigés que leur intitulé ne laisse même pas présager leur teneur (c'est le cas pour le décret relatif aux décharges pour activités de recherche des PRAG ou PRCE doctorants ou docteurs, nous y reviendrons dans un autre article de ce blog)

- connaître les normes supérieures (constitution, lois mais aussi traités internationaux) que les textes précédents doivent en principe respecter et en quoi ils ne les respectent pas

 Ces connaissances ne suffisent pas, il faut encore pouvoir imposer le respect effectif de ces droits par l'administration, voire par le législateur (si la loi en cause ne respecte pas la Constitution ou un traité international), par une action en justice

C'est dans ce contexte que s'inscrit la réclamation du SAGES adressée au Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS):

- https://www.coe.int/fr/web/european-social-charter/-/no-211-2022-syndicat-des-agreges-de-l-enseignement-superieur-sages-v-france pour un court résumé 

- cliquer ensuite sur Pièce n° 1, réclamation enregistrée le 2 mai 2022  pour avoir accès au texte de la réclamation

 Avec cette réclamation( cf. son § B-1), vous découvrirez jusqu'à quel point les missions et fonctions des PRAG et des PRCE sont identiques ou similaires à celles des maîtres de conférence, c'est la synthèse la  plus complète et la mieux argumentée que vous trouverez sur le sujet.

Il y est amplement question aussi de la liberté académique, sous un aspect qui semble n'avoir a priori que peu d'incidence sur la vie quotidienne des PRAG et des PRCE mais qui en réalité est essentiel pour eux, pour la considération à leur égard de l'administration, et pour obtenir, enfin une égalité de traitement symbolique et matérielle avec les maîtres de conférence.

Nos juridictions administratives justifient souvent les différences de traitement les plus absurdes et les plus injustes entre fonctionnaires sur la simple considération qu'ils n'appartiennent pas aux mêmes corps. Le droit européen en revanche se fonde sur une comparaison concrète des situations et il lui suffit que deux situations soient comparables pour qu'une différence de traitement ait à ses yeux un caractère discriminatoire. Ce comité européen va donc examiner cette comparaison, après qu'un tribunal administratif puis une cour administrative d'appel aient refusé d'en tirer la moindre conséquence.

Pour mener une telle action, il fallait un syndicat qui veuille et qui puisse agir comme l'avocat des PRAG et des PRCE, un syndicat qui a gagné devant le Conseil Constitutionnel (https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2020/2020860QPC.htm ) sans devoir avoir recours à un avocat, parce qu'il a décidé de se spécialiser dans la mise en oeuvre effective du droit.

Denis ROYNARD

Président & juriste du SAGES (www.le-sages.org) 

 



  


 


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